Que personne ne se sente seul

À l'occasion du 150ème anniversaire de la mort du saint Curé d'Ars, le pape a proclamé une année sainte sacerdotale dans l'Église. Saint Josémaria vénérait profondément saint Jean-Marie Vianney, patron et modèles des prêtres, pour son amour immense de Dieu et son zèle ardent pour le salut des âmes. Voici le témoignage de mgr Joachim Alonso, collaborateur directe de saint Josémaria pendant 22 ans, sur sa charité avec les prêtres.

« La charité de saint Josémaria pour les prêtres était constante, grandiose parce qu’elle découlait de cette profonde humilité, qui aux dires de saint Augustin, procède de la charité ».

Mgr Joachim Alonso, consulteur théologique de la Congrégation pour les Causes des Saints et proche collaborateur de saint Josémaria durant 22 ans, centra, avec ce propos, la rencontre de dizaines de prêtres et de séminaristes à l’Université Pontificale de la Sainte-Croix, à Rome.

Il a voulu partager, très familièrement, avec ses auditeurs, ses souvenirs sur l’amour constaté dans la vie de saint Josémaria pour ses frères prêtres. Il a parcouru une partie de la biographie du fondateur de l’Opus Dei et s’est arrêté spécialement à la fin des années 60 pour raconter comment saint Josémaria avait encouragé plusieurs prêtres de l’Opus Dei à mettre en route des initiatives pour favoriser la fraternité sacerdotale à Rome.

Don Joachim Alonso, Rome, 2008

« C’est alors qu’est né le Centre Romain de rencontres sacerdotales, le CRIS. Nous organisions des réunions, des conférences et nous rendions visite aux prêtres âgés ou malades. En effet, Rome était pleine de cardinaux, d’évêques, de curés, de prêtres… de plus de 80 ans ou malades ayant besoin d’un contact, de quelqu’un qui les écoute… »

Saint Josémaria tenait spécialement à trouver un remède à leur solitude, il ne voulait qu’aucun prêtre puisse se trouver tout seul. « De nos jours, dit mgr Alonso, la société est globalisée. Nous regorgeons de choses, mais sommes seuls ». Il a précisé comment il avait appris du fondateur de l’Opus Dei que la charité ne consiste pas à « parler de choses élevées » mais à se soucier des petits détails, à faire en sorte que les autres sourient, qu’ils se sentent en famille. Saint Josémaria nous encouragea aussi à avoir des initiatives à caractère culturel et doctrinal ».

Durant les années 70, le CRIS vit défiler, dans le cadre de ces activités, des intellectuels comme Victor Frankl, Jérôme Lejeune, Joseph Pieper, Sergio Cotta, Antonio Millan Puelles, Peter Berglar et plusieurs dizaines d’évêques.

Karol Wojtyla et don Joachim le 13 octobre 1974

« Un jour, est arrivé un jeune cardinal polonais, très sympathique. C’était Karol Wojtyla. Le futur pape était à Rome pour un synode et il a voulu assister à la rencontre du CRIS où allait s’exprimer le cardinal allemand Joseph Hoffner. Nous l’avons interviewé : nous lui avons adressé nos questions en italien et il nous a répondu en polonais. Je me souviens qu’il avait tout écrit avec un stylo bic un peu défaillant. Je n’ai rien compris, excepté une phrase en latin, à l’entête de chaque page. C’était un extrait de la séquence Veni Sancti Spiritus. Nous avons imprimé cette interview pour la diffuser. Deux ans plus tard, le cardinal Wojtyla fit une conférence au CRIS ».

« Sans l’Eucharistie, le prêtre n’existe pas, cette idée était au centre de la prédication de saint Josémaria lorsqu’il évoquait la vie sacerdotale. Aussi, avons-nous été poussés à organiser des activités permettant de cultiver cette dévotion eucharistique: des moments d’adoration du Saint Sacrement, par exemple, avec les prêtres diocésains et les séminaristes. Par la suite, nous avons étendu nos activités en Allemagne où nous nous retrouvions l’été ».

Durant cette rencontre, mgr Alonso a sommairement brossé la personnalité de saint Josémaria. « Le Jeudi Saint de l’année 1975, nous étions à l’oratoire de la Pentecôte, au siège central de l’Opus Dei. Soudain, saint Josémaria a commencé à prier à voix haute : « Au bout de cinquante ans, je suis comme un enfant qui balbutie : je commence et je recommence » .

À un moment donné, il l’avait entendu dire :« Le Père ? Un pécheur qui aime Jésus-Christ, qui n’a pas fini d’apprendre les leçons que Dieu lui donne ; un gros bêta : voilà ce qu’est le Père ! Dites-le à ceux qui vous le demanderont, car on vous le demandera ».

Assistants à la conférence organisée par l’Université Pontificale de la Sainte-Croix

Plus tard, dans un dialogue avec le public, mgr Alonso ajouta: “Qu’ai-je donc appris de saint Josémaria Escriva ? me demanderez-vous. Et je vous dirai : Je ne sais pas. Je le saurai lorsque je serai parvenu devant Dieu. Je sais ce qu’il m’a enseigné, mais je ne sais pas ce que j’ai appris. Il m’a appris la joie d’être chrétien. J’insiste sur la joie parce qu’elle est une caractéristique propre à la vie chrétienne. Tous les ans, sur les premières pages de l’épacte dont il se servait, (là où l’on indique quelle est la messe du jour), il écrivait : In lætitia nulla dies sine Cruce ! (Dans la joie, nulle journée sans Croix !) »

Mgr Alonso fit aussi allusion à la relation de saint Josémaria avec la Très Sainte Vierge qui « n’était pas qu’une dévotion puisque toute son existence avait un sens marial ».